Une communauté de pratique (CdeP) est formée par un groupe de personnes qui ont une activité commune et se rencontre à intervalle régulier pour échanger et apprendre les unes des autres.

La CdeP est un véhicule d’apprentissage collectif de plus en plus populaire. Certains y voient une panacée alors que d’autres croient qu’il s’agit d’un engouement passager. À travers le système de santé et services sociaux québécois, un grand nombre de CdeP de toutes sortes sont démarrées pour faciliter les échanges et la collaboration entre les membres d’un champ de pratique, au-delà des frontières organisationnelles et occupationnelles.

Les CdeP sont souvent démarrées sans suivre une méthodologie spécifique par des personnes qui ne maîtrisent pas les principes permettant de mobiliser les membres et de pérenniser l’initiative. Il est donc fréquent d’observer qu’après un certain nombre de rencontres, les personnes membres d’une CdeP se démobilisent parce qu’elles ont le sentiment de tourner en rond, ne comprennent pas bien ce qui est attendu d’elles et/ou ne partagent pas un projet d’avenir clairement défini.

Nous avons conçu cette formation pour répondre à ce problème. Cette formation vise à fournir aux personnes qui initient et/ou accompagnent le démarrage d’une CdeP une démarche structurée formée de six modules appliqués et faciles d’accès.

Elle peut aussi être utilisée pour renforcer les capacités organisationnelles d’une CdeP qui existe depuis un certain temps et qui ne répond pas aux attentes des personnes membres et/ou des organisations qui soutiennent ses activités.

Après avoir complété cette formation, vous serez en mesure d’appliquer un ensemble de concepts, méthodes et outils permettant d’accompagner efficacement la mise en œuvre d’une CdeP rassembleuse et pérenne.

Des CdeP sont démarrées dans différents contextes et pour diverses raisons. Certaines regroupent moins de dix membres alors que d’autres en rassemblent des centaines. L’adhésion à une CdeP peut être homogène (les membres ont un rôle semblable dans différentes organisations) ou hétérogène (les membres jouent des rôles différents mais partagent un projet d’avenir commun). Ainsi, il n’existe pas de recette unique pour réussir le démarrage d’une CdeP. Nous croyons toutefois qu’adopter dès le départ une démarche structurée permettant de se poser les questions qui doivent être répondues avec les personnes membres pour mettre en place des compréhensions partagées qui favorisent le succès d’une CdeP.

Pour concevoir cette formation, nous avons rassemblé un comité consultatif, piloté par Mathieu Bouchard, composé de six membres ayant une variété d’expériences personnelles à démarrer, soutenir, coordonner et/ou animer des CdeP à l’échelle provinciale dans le domaine des soins de santé et services sociaux.

Nous nous sommes engagés ensemble dans un processus d’apprentissage collectif inspiré des principes d’une CdeP. C’est-à-dire que les principes présentés dans cette formation ont en bonne partie été mis en pratique pour guider le processus collaboratif. Ces personnes ont été invitées à une série de six rencontres mensuelles d’une durée de 60 minutes chacune. Nous avons fait des tours de table permettant à chaque membre de s’exprimer à tour de rôle sur les thèmes abordés dans chacun des six modules ci-dessous. Pour chacun des thèmes, trois questions ont été proposées à l’avance. Elles visaient à susciter la réflexion des membres, tout en les invitant à s’exprimer à ce propos en s’appuyant sur leur expérience personnelle d’une CdeP spécifique.

Ce processus de conception participative a permis de

1)  valider et d’approfondir les thèmes proposés

2) de documenter des exemples représentant une variété de contextes et de raisons pouvant mener au démarrage d’une CdeP

3) d’identifier une variété de problèmes rencontrés et de solutions mises en oeuvre.

L’objectif de ce module est de permettre aux personnes membres de développer une compréhension partagée de ce que représente une CdeP, pour elles et pour leurs organisations. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) À quelle pratique commune s’identifient les membres?

2) Quel rôle jouent les membres dans leurs milieux de travail? Et (3) Quels sont les critères pour pouvoir être membre de la CdeP?

Voici une synthèse de nos échanges :

Une CdeP permet de rassembler à intervalle régulier un groupe de personnes œuvrant dans différentes organisations pour échanger sur une pratique commune. La nature de la pratique varie grandement d’une CdeP à l’autre. Lors de notre tour de table, les pratiques suivantes ont été évoquées : déploiement de l’approche du partenariat patient à travers le système de santé ; recherche en santé mondiale ; recherche sur l’origine développementale de la maladie et de la santé ; introduction d’objets connectés dans les soins de santé ; soutien à la gestion documentaire de la recherche en santé. Certaines pratiques sont de nature plus stratégique (p. ex., déploiement du partenariat patient), alors que d’autres sont de nature plus opérationnelle (p. ex., soutien à la gestion documentaire).

Dans les universités et les centres de recherche, il y a une stratégie de conservation selon le type de document, la sensibilité du document, la sécurité, la durée d’archivage, etc. Il faut retrouver l’information au bon moment et la rendre disponible aux personnes qui prennent des décisions de gestion, clinique, etc. La gestion documentaire ça inclut toute cette pratique-là dans chacun des établissements.

Stéphane Dubuc

Le rôle des membres dans leurs milieux de travail varie grandement d’une CdeP à l’autre : innovation (p. ex., objets connectés); développement méthodologique (p. ex., partenariat patient); création et diffusion de nouvelles connaissances (p. ex., recherche en santé mondiale); soutien à la prise de décision (p. ex., gestion documentaire). Les échanges réguliers entre membres leur permettent d’apprendre les uns des autres, de créer des liens entre eux, et de coordonner leurs actions vers l’atteinte d’un objectif partagé. Aborder le rôle des membres dans les milieux où ils évoluent permet de comprendre comment leur pratique commune, s’inscrit dans l’organisation interdisciplinaire du travail dans leurs milieux et permet d’entamer une réflexion sur les notions d’écosystème et d’impact, approfondies dans les modules 5 et 6.

Définir clairement les critères de membership permet aux membres de comprendre ce qu’est leur CdeP et ce qu’elle n’est pas. Certaines CdeP sont composées de membres occupant tous un rôle similaire (p. ex., responsables de la gestion documentaire ; chercheurs en santé mondiale) alors que d’autres CdeP regroupent des membres occupant des rôles différents mais complémentaires en lien avec une pratique commune (p. ex., patients et chercheurs impliqués dans le déploiement de l’approche du partenariat patient; patients, développeurs, cliniciens et chercheurs intéressés aux objets connectés).

Ce que j’adore de cette communauté-là, c’est qu’il y a des gens de partout. On a des chercheurs, des cliniciens, des développeurs d’applications ou de gadgets ultra sophistiqués, et on a aussi des patients – des patients pas connectés, d’autres trop connectés.

– Sylvain Bédard

Développer une compréhension partagée de la pratique commune des membres, de leur rôle spécifique dans leurs milieux de travail et des critères de membership permet de définir l’identité d’une CdeP, c’est-à-dire ce que la CdeP représente pour ses membres. C’est sur l’identité de la CdeP pour ses membres que se fonde leur sentiment d’appartenance envers elle. Il s’agit donc d’une condition clé d’engagement.

L’objectif de ce module est de développer une compréhension partagée entre les personnes membres de la CdeP de ce qu’elles souhaitent accomplir ensemble en s’y impliquant. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) À quel enjeu commun sont confrontés les membres ? 

2) Quel projet poursuivent ensemble les membres ?

3) Quel est le plan d’action des membres pour accomplir ce projet ?

Voici une synthèse de nos échanges :

Déterminer l’enjeu commun auquel les membres d’une CdeP sont confrontés dans leurs milieux de travail respectifs permet de cibler l’apprentissage collectif sur cet enjeu. L’enjeu peut être le manque de communication entre des personnes qui travaillent dans un même domaine (p. ex., recherche en santé mondiale), le sentiment d’isolement des équipes qui couvrent différents territoires (p. ex., déploiement du partenariat), ou encore des difficultés à interpréter les règles et standards de pratique de manière uniforme (p. ex., soutien à la gestion documentaire). Dans chacun de ces exemples, les membres d’une CdeP échangent à intervalle régulier sur un enjeu commun dans le but d’apprendre ensemble à y répondre.

On s’est rendu compte qu’on travaillait beaucoup en silos, et c’était un enjeu de voir comment on peut travailler ensemble. Et ce qui revenait beaucoup dans les discussions avec les chercheurs, c’est qu’on manquait d’accès aux données. Tout le monde avait ses données, mais personne n’avait une banque de données commune auxquelles tous les chercheurs auraient accès.

– Marie-Hélène Vaillancourt

Les échanges sur l’enjeu commun mènent à l’élaboration d’un projet d’avenir que visent à accomplir ensemble les membres d’une CdeP. Partager un projet d’avenir permet d’orienter l’action collective dans une direction choisie de manière délibérée et bien comprise par les membres. Nos échanges ont aussi souligné l’importance de réviser périodiquement le projet d’avenir parce que le contexte et les besoins des membres évoluent dans le temps. Un projet d’avenir élaboré il y a quelques années peut avoir perdu de son actualité ou devoir être réorienté afin de maintenir les membres pleinement mobilisés.

Dans le milieu du partenariat patient, le projet d’avenir, c’est l’idée qu’on va changer la culture pour reconnaître vraiment les savoirs patients à travers le système de la santé. Ça se rattache à un mouvement social d’humanisation et de démocratisation des soins de santé. 

– Myriam Fournier-Tombs

Pour accomplir le projet d’avenir élaboré ensemble, les membres d’une CdeP doivent concevoir un plan d’action. À l’étape du démarrage d’une CdeP, il est normal et sans doute souhaitable que le plan d’action ne soit pas pleinement déterminé car les membres doivent d’abord prendre le temps d’échanger pour définir leur identité et leur projet d’avenir. « Là où on a un peu plus de difficulté dans notre groupe de travail, c’est les actions concrètes qu’on va mettre en place. Tout le monde a des esprits de grandeur, c’est difficile parfois de se fixer des objectifs qui vont être communs et précis, » nous explique Marie-Hélène Vaillancourt. Par ailleurs, il est important d’échanger sur le plan d’action dès le début d’une CdeP pour que les membres puissent concevoir ensemble des espaces et des processus qui vont permettre de déployer une démarche orientée vers l’accomplissement du plan d’action.

La gestion documentaire, ils ont un système asynchrone autour d’un forum où on peut avoir des questions, des échanges, des réponses, du partage, et ils ont aussi des actions de type plus synchrone. Donc des rencontres, autour de la notion de « chantier » où ils vont identifier les priorités, et ils vont pouvoir ensemble lors d’échanges concrets avancer un dossier jusqu’à certains livrables, ou une certaine solution.

– Stéphane Dubuc

L’objectif de ce module est de développer une compréhension partagée entre les personnes membres de la CdeP du niveau d’engagement attendu et du déroulement prévu des interactions. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) Quelle est la fréquence des rencontres

2) Quelle est la durée des rencontres ? 

3) Quelle séquence d’activités structure les rencontres ?

Voici une synthèse de nos échanges :

Nos échanges indiquent qu’il est souhaitable d’atteindre un équilibre dans la fréquence et la durée des rencontres. Bien que la fréquence des rencontres varie d’une CdeP à l’autre, un intervalle de 4 à 6 semaines entre les rencontres semble faire consensus. Cette fréquence permet de garder un momentum sans pour autant être trop demandante pour les membres. Pour ce qui est de la durée des rencontres, « 90 minutes, ça me semble assez standard, » suggère Marie-Hélène Vaillancourt. Compte tenu qu’un grand nombre de CdeP se déroulent maintenant en ligne, des rencontres plus longues peuvent effectivement être épuisantes. Il peut être utile d’insérer une pause de 5 à 10 minutes au milieu des rencontres pour permettre aux membres de se dégourdir afin de retrouver la concentration. La durée des rencontres doit être adaptée aux besoins particuliers des membres.

Après 90 minutes le niveau de concentration baisse, on commence à avoir sommeil. Donc selon moi, dans une communauté avec des personnes âgées, par exemple, une heure serait suffisante. 

– Samira Amil

Nos échanges soulignent aussi que le format des rencontres peut varier et qu’une même CdeP peut combiner différents types d’activités. Les rencontres en direct peuvent être complétées d’un forum de discussion accessible en tout temps et sur lequel les membres échangent par écrit entre les rencontres. Il peut être utile de proposer aux membres un webinaire à l’occasion sur l’heure du dîner ou à un moment convenant au plus grand nombre. Certaines CdeP organisent annuellement une ou deux rencontres d’une journée en personne, structurée en ateliers et durant lesquels on invite des partenaires, ce qui permet de renforcer les liens humains entre les personnes membres en dépassant la distance du virtuel. Cela demande toutefois plus d’organisation, de ressources et de disponibilité de la part des membres.

Plus le comité est gros, plus on a tendance à espacer les rencontres parce que c’est difficile de réunir tout le monde. Plus le comité est petit, plus on arrive à avoir une certaine fréquence. Je voyais l’importance d’avoir un canal de communication en tout temps, d’avoir un moyen de pouvoir rester engagés, que si on a une idée, d’avoir un endroit où on peut aller la déposer.

– Stéphane Dubuc

Pour créer un sentiment de familiarité sécurisant, il est souhaitable de structurer les rencontres selon une séquence d’activités qui se répète d’une rencontre à l’autre et qui sont inscrites dans un ordre du jour partagé avant les rencontres. Ça permet aux personnes membres de savoir à quoi s’attendre, de comprendre ce qui est attendu d’elles, et donc de se sentir en confiance. La séquence d’activités peut inclure un tour de table où les membres partagent ce qui s’est produit dans leurs milieux depuis la dernière rencontre, une période de présentation ou de discussion sur un thème ciblé, un moment dédié à la prise de décision collective et à la détermination des orientations générales de la CdeP, ainsi qu’un varia permettant de mentionner des éléments qui ne sont pas à l’ordre du jour.

En résumé, la fréquence et la durée des rencontres, leur format ainsi que la séquence d’activités qui les structurent forment un rituel permettant de créer un sentiment d’appartenance chez les membres. Le rituel permet aussi de créer un espace distinct des activités quotidiennes qui favorise un échange réflexif entre les membres sur leur pratique commune et sur le projet d’avenir qu’ils poursuivent ensemble.

L’objectif de ce module est de développer une compréhension entre les personnes membres sur la manière dont les décisions sont prises et le leadership est exercé dans la CdeP. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) Qui détermine les orientations générales de la CdeP et selon quels principes ?

2) Qui planifie les rencontres de la CdeP et selon quels principes ?

3) Qui anime les rencontres de la CdeP et selon quels principes ?

Voici une synthèse de nos échanges :

Une réflexion doit être entamée en amont avec les membres sur le processus de détermination des orientations générales de la CdeP, ce qui inclut son mode de fonctionnement et le projet d’avenir poursuivi par ses membres. Nos échanges démontrent qu’un équilibre doit être atteint entre la prise de décision partagée et la détermination centralisée des orientations générales. Des mécanismes de prise de décision partagée favorisent la responsabilisation des membres mais peuvent demander beaucoup de temps et d’efforts. Cela peut inclure des sondages envoyés aux membres et des échanges synchrones (pendant les rencontres) ou asynchrones (sur un forum en ligne). Cela peut aussi impliquer la création, parmi les membres, d’un comité de gouvernance chargé d’élaborer les orientations générales de la CdeP et de valider ensuite avec l’ensemble des membres, ou encore de comités ciblés sur des « chantiers » spécifiques.

Je pense quand même qu’il y a une coordination centrale qui est nécessaire, mais de plus en plus l’aspect participatif pousse à la mobilisation des participants, parce qu’encore une fois, au fil du temps, comme les CdeP sont très populaires, il peut y avoir un certain désengagement, donc l’aspect participatif est important pour que les gens se sentent impliqués et responsables de l’initiative.

– Myriam Fournier-Tombs

Une coordination centrale peut être appréciée lorsque le projet d’avenir et le mode de fonctionnement de la CdeP sont bien compris et acceptés par les membres. Ça allège le processus, permettant ainsi aux membres de dédier l’essentiel de leur temps ensemble à échanger ensemble sur leur pratique commune. Une trop grande centralisation peut toutefois éroder le sentiment d’appartenance des personnes membres lorsqu’elles perçoivent qu’elles n’ont pas de voix dans la détermination des orientations générales de la CdeP et que celles-ci ne les représentent pas. Cet équilibre délicat à maintenir entre décision partagée et centralisation s’applique aussi à la planification des rencontres, ce qui inclut le choix du rituel (fréquence, durée et format des rencontres), la prévision du moment auquel les prochaines rencontres se tiendront, ainsi que la conception de l’ordre du jour des rencontres et le choix des thèmes à aborder.

Une coordination centrale aide à structurer et aide aussi à la motivation des membres parce que, dans mon cas, les chercheurs ont un horaire très chargé, ils sont impliqués un peu partout, ils ont plusieurs groupes en même temps, ils ont des comités, plein de choses, donc d’avoir quelqu’un central qui va organiser les rencontres, ça les aide énormément.

– Marc Fraser

L’équilibre entre décision partagée et coordination centrale doit aussi être réfléchi au niveau de l’animation des rencontres. Nos échanges indiquent qu’avoir une personne dédiée à l’animation favorise la fluidité des rencontres. Il est aussi souhaitable qu’une personne soit dédiée à la prise de notes afin de documenter les échanges tenus et de pouvoir s’y référer plus tard. Les tâches de coordonner, animer et documenter une CdeP doivent être considérées dans les responsabilités de la personne qui les assume de manière à faire partie intégrante de sa charge de travail envers l’organisation qui l’emploie. Une animation participative des rencontres peut se faire par la mise en place d’espaces d’échange informel, de moments dédiés à élaborer entre membres l’ordre du jour de la rencontre suivante, ou encore de périodes pendant lesquelles les membres peuvent présenter et animer à tour de rôle une discussion sur un thème de leur choix.

L’objectif de ce module est de développer une compréhension partagée de l’étendue des réseaux auxquels les membres d’une CdeP ont accès ensemble et donc de leur périmètre d’action et d’influence. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) À quelles organisations sont affiliés les membres?

2) Quel est la fonction de la CdeP dans son écosystème?

3) Quelles ressources les membres sont-ils en mesure de mobiliser pour soutenir la CdeP?

Voici une synthèse de nos échanges :

La mise en œuvre de principes de gouvernance qui répondent à la volonté générale des membres d’une CdeP doit s’appuyer sur une réflexion collective sur l’écosystème dans lequel elle se situe. Nous comprenons un « écosystème » comme l’ensemble des réseaux auxquels les membres d’une CdeP ont collectivement accès par la variété d’organisations et de groupes sociaux auxquels les membres appartiennent et sont liés. On pense d’abord aux organisations pour et avec lesquelles les personnes membres travaillent ainsi que les réseaux dans lesquels elles pratiquent.

Nos membres dans ce groupe de travail-là sont tous affiliés au réseau de l’Université du Québec. Notre groupe fait partie du Regroupement intersectoriel de recherche en santé de l’Université du Québec, donc ça regroupe tous les chercheurs en santé mondiale des 10 établissements. Et notre groupe est aussi affilié à l’association canadienne pour la santé mondiale. Évidemment, ces chercheurs-là sont aussi affiliés à différents réseaux de recherche.

– Marc Fraser

Animer un échange sur l’étendue de l’écosystème dans lequel les membres évoluent permet de considérer les partenaires intéressés à soutenir la CdeP de manière à mobiliser les ressources nécessaires à la poursuite et au déploiement de ses activités. En effet, la coordination et l’animation des rencontres, la gestion des outils utilisés, les webinaires, rencontres d’une journée en personne et autres activités qui rendent une CdeP dynamique et enrichissante demandent des ressources. De plus, pour qu’une CdeP dure dans le temps, il faut que des organisations investissent dans son existence en lui attribuant des ressources.

La communauté profite aux individus, aux établissements où ils travaillent, et à la direction qui a le mandat d’avoir et de générer des données de qualité. Alors moi, pour comprendre l’écosystème, je pars de la pratique d’abord. Donc, si la pratique c’est l’entrée des données registraires, bien je la mets au centre et je regarde à qui profite la pratique.

– Stéphane Dubuc

Cette réflexion collective permet aussi de mieux comprendre la fonction d’une CdeP dans son écosystème. Cette fonction tend à être liée à la composition des membres. Les CdeP dont l’adhésion est homogène permettent d’approfondir un savoir-faire partagé entre personnes qui jouent un rôle semblable dans différentes organisations (p. ex., santé mondiale; gestion documentaire) alors que les CdeP dont le l’adhésion est hétérogène (p. ex., objets connectés; partenariat patient) permettent de collaborer au-delà des silos occupationnels de manière à développer des pratiques innovantes en croisant différents types de savoir-faire.

Il y a quelques années, il y avait eu une discussion sur la fonction d’une CdeP, est-ce que c’est de se mobiliser pour se positionner sur un enjeu, ou si c’est dans une perspective de partage mutuel et d’apprentissage? Je crois que c’est important de clarifier ce bout-là pour les personnes qui veulent plus exercer un pouvoir d’action collective.

– Myriam Fournier-Tombs

L’objectif de ce module est de développer une compréhension partagée, entre les membres, des raisons et des moyens utilisés pour mesurer et évaluer l’impact des activités de la CdeP sur les membres et sur leur entourage. Pour explorer ce thème, les membres de notre comité ont échangé sur les questions suivantes, en appuyant leur propos sur leur expérience personnelle en lien avec une CdeP spécifique :

1) Quels sont les impacts attendus de la CdeP?

2) Sur quel horizon temporel ces impacts sont-ils attendus ?

3) Comment ces impacts peuvent-ils être mesurés et évalués?

Voici une synthèse de nos échanges :

Une CdeP peut avoir de l’impact auprès des personnes qui en sont membres ainsi que des organisations et des écosystèmes dans lesquels ces personnes évoluent. Au niveau individuel, être membre d’une CdeP permet de briser l’isolement que plusieurs vivent au quotidien, en créant des liens avec d’autres personnes qui partagent notre pratique ou nos intérêts. Cela permet aussi d’apprendre les uns des autres de manière à développer de nouvelles compétences.

Mais je pense qu’à court terme, il y a un impact direct sur les patients et citoyens membres de la CdeP. Ils développent un sentiment d’appartenance, ils rencontrent d’autres personnes qui ont le même intérêt qu’eux pour participer à un projet de société. Ça leur permet aussi de partager des expériences. C’est un espace d’apprentissage collectif, il y a une montée en capacité de ces patients-là par les interactions avec les pairs et aussi par la formation continue.

– Samira Amil

Au niveau des organisations et de l’écosystème dans lesquels les membres évoluent, l’impact de la CdeP fait écho à sa fonction, que nous avons considérée au module précédent. Nos échanges indiquent qu’une CdeP peut permettre de renforcer la cohésion d’un écosystème en créant des liens entre personnes. Il peut s’agir soit de personnes qui ont une pratique commune, mais évoluent dans différentes organisations, ou encore de personnes qui ont des pratiques différentes mais partagent un même projet et ont l’occasion d’échanger entre elles grâce à une CdeP qui permet de les rassembler.

Différentes méthodes permettent de mesurer et évaluer les impacts d’une CdeP sur les personnes membres ainsi que sur les organisations et écosystèmes dans lesquels elles évoluent. Les impacts peuvent être mesurés en suivant la variation de certains indicateurs dans le temps. Certains indicateurs permettent d’évaluer le fonctionnement de la CdeP, comme le niveau de satisfaction des membres, leur assiduité aux rencontres, le nombre de personnes ayant participé aux conférences ou formations offertes, ou encore la diversité ethnoculturelle, de genre ou de lieu de résidence des membres. On peut évaluer l’impact de la CdeP dans son écosystème en documentant le nombre d’activités tenues et de participants à ces activités.

On veut réunir des gens qui n’étaient pas ensemble avant pour créer un genre de famille en santé mondiale à travers les établissements de l’Université du Québec. Donc ça l’impact est facile à mesurer, c’est la participation, la mobilisation. Les occasions d’échange et de réseautage entre les étudiants, les chercheurs, ça augmente aussi par la mise en place de différentes activités. On voit aussi une possibilité d’avoir un effet de levier pour aller chercher des subventions, du financement pour des projets, ou pour faire monter un projet qui serait mis en place.

– Marc Fraser

Afin de porter un regard sur l’étendue et le caractère inclusif d’une CdeP, on peut mesurer la diversité des membres en termes de leur localisation géographique, appartenance ethnoculturelle, de genre ou encore de statut social. Selon nos échanges, il semble qu’une évaluation annuelle composée d’un certain nombre de mesures d’impact liées au projet d’avenir poursuivi par les membres et à la fonction de la CdeP dans son écosystème puisse permettre d’évaluer si elle répond aux attentes et de mettre en œuvre des correctifs ou des améliorations lorsque cela s’avère nécessaire.

Biographies professionnelles des membres du comité consultatif
(présentées dans l’ordre alphabétique du nom de famille)

Samira Amil

Samira est professionnelle de recherche à VITAM, centre de recherche en santé durable, et coordonnatrice aux projets de recherche. Elle est coresponsable patiente-citoyenne de l’Antenne partenariat au Réseau universitaire intégré de santé et de services sociaux (RUISSS) de l’Université Laval et membre de Communauté Expériences. Elle siège au comité scientifique et au sous-comité équité, diversité et inclusion (EDI) de l’Unité de soutien au système de santé apprenant (SSA) Québec. Elle est formée en nutrition et en médecine.

Sylvain Bédard

Sylvain travaille au Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP) depuis 2016 comme patient coordonnateur en recherche. Il soutient des projets de recherche, des réseaux de recherche, contribue à la création de communautés de patients en transplantation, en don d’organe et en arythmie cardiaque. Il est membre de la Communauté de pratique sur les objets connectés et la santé numérique du CHUM. Il a été gestionnaire de projets dans le milieu des arts pendant plus de 25 ans. Il est patient partenaire depuis 42 ans. Il est deux fois transplanté cardiaque, vit avec cinq maladies chroniques et a survécu à plus de 25 chirurgies.

Mathieu Bouchard

Mathieu Bouchard est chercheur postdoctoral en stratégie et organisation à l’École de gestion Telfer de l’Université d’Ottawa. Il participe à des communautés de pratique, en accompagne le développement et étudie leur fonctionnement depuis plusieurs années. Il est cofondateur et éditeur du magazine Expériences. Site web : mathieubcd.com/fr

Stéphane Dubuc

Stéphane est coordonnateur de l’équipe de soutien du Programme national de gestion des savoirs (PNGS) du système de santé du Québec, rattaché au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Estrie – Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS). Le mandat du PNGS est d’offrir des services pour les communautés de pratique inter-établissements du réseau de la santé et des services sociaux à l’échelle provinciale. Ces communautés portent sur une variété de sujets (pratiques cliniques, processus de gestion, soutien administratif) et comptent entre 30 et 400 membres.

Marc Fraser

Marc est professeur enseignant en chimie à l’École des technologies supérieures (ETS). Il était auparavant codirecteur exécutif du Regroupement intersectoriel de recherche en santé de l’Université du Québec (RISUQ). Dans ce rôle, il a facilité le démarrage et le développement de plusieurs communautés de pratique inter-établissements en recherche. Il a obtenu un doctorat en biologie de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et a ensuite complété un postdoctorat en santé environnementale à l’Université TÉLUQ.

Myriam Fournier-Tombs

Myriam est responsable du Réseau du Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public et coordinatrice de l’Axe Partenariat de l’Unité de soutien au système de santé apprenant (SSA) Québec. Dans ce rôle, elle facilite le démarrage et le développement de plusieurs communautés de pratique inter-établissements. Elle a obtenu une maîtrise en leadership et gestion de la santé de l’Université de McGill et est actuellement étudiante au doctorat en santé globale à l’Université de Genève.

Marie-Hélène Vaillancourt

Marie-Hélène est directrice exécutive du Regroupement intersectoriel de recherche en santé de l’Université du Québec (RISUQ). Dans ce rôle, elle facilite le démarrage et le développement de plusieurs communautés de pratique inter-établissements. Elle a obtenu une maîtrise en Science de la gestion, responsabilité sociale et environnementale à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et a ensuite travaillé à la Fondation cancer du sein du Québec en éducation et sensibilisation à la prévention du cancer du sein.

Nous remercions chaleureusement les membres du comité consultatif ainsi que Cathy Bazinet, Audrey L’Espérance, Janette Mujica, Caroline Wong, Virginie Belval-Nadeau, Myra Drolet et France Lemieux pour leurs précieuses contributions au développement de ce cette formation.

Ce projet a été rendu possible grâce à l’appui financier de l’Unité de soutien au système de santé apprenant (SSA) Québec et du Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP). Nous leur exprimons nos sincères remerciements pour leur contribution inestimable.

Rokhy Diongue, Émilie Grenier, Marie-Dominique Poirier et Annie LeBlanc (2022)
Généralités et mise en place d’une communauté de pratique : planifier, animer et évaluer
Unité de soutien SSA Québec
https://ssaquebec.ca/nouvelles/generalites-et-mise-en-place-dune-communaute-de-pratique-planifier-animer-et-evaluer/

Cécile Vialaron, Louise Normandin, Annie-Danielle Grenier et Marie-Pascale Pomey (2022)
L’apport d’une CdeP en temps de crise
Risques & qualité en milieu de soins
https://www.risqual.net/publication-scientifique/lapport-dune-communaute-de-pratique-en-temps-de-crise-le-cas-du-quebec-et-du-partenariat-de-soins-et-de-services-avec-les-patients


David Longtin (2021)
Outils d’évaluation en innovation sociale : Résumé de la revue de la littérature et des pratiques sur l’évaluation des innovations sociales
Réseau québécois en innovation sociale
http://www.rqis.org/wp-content/uploads/2022/01/Resume-de-la-revue-de-litterature-et-des-pratiques_VF.pdf

Mesure d’impact social – formation à distance
Comité sectoriel de main-d’œuvre de l’économie sociale et de l’action communautaire (CSMO-ÉSAC)
https://www.csmoesac.qc.ca/formations-en-ligne/mesure-dimpact-social

André Fortin et Franck Louesdon (2021)
Se développer en rhizome : Guide pratique sur la cocréation
https://www.guidecocreation.com/

Solange St-Pierre
La théorie des communautés de pratique; Apprentissage, sens et identité : Etienne Wenger – Résumé de lecture commenté
https://www.diffusion-focusing.org/doc/gouvernance/wenger/communaute-de-pratique/resume-commente-sstp.pdf

What is Action Learning?
Government of New South Wales
http://www.ngolearning.com.au/files/Others/learningseries/WhatisActionLearning.pdf

Gerry Johnson, Shameen Prashantham, Steven W. Floyd et Nicole Bourque (2010)
The ritualization of strategy workshops
Organization Studies
https://www.researchgate.net/publication/44897988_The_Ritualization_of_Strategy_Workshops

Davide Nicolini, Igor Pyrko, Omid Omidvar and Agnessa Spanellis (2022)
Understanding Communities of Practice: Taking Stock and Moving Forward
Academy of Management Annals
https://journals.aom.org/doi/abs/10.5465/annals.2020.0330?journalCode=annalsContenu d’accordéon

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Le Centre d’Excellence sur le Partenariat avec les Patients et le Public est une initiative conjointe soutenue par l’Université de Montréal (UdeM), la Faculté de médecine de l’UdeM et le Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CRCHUM).

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